"Hommes/femmes politiques, journalistes au petit pied, philosophes du dimanche ou stars à la ramasse: tous sèment des perles de bêtise, sans se douter que, dans l'ombre, l'autruche les note, les commente, s'en gausse, et recrache le tout sur ce blog."

mercredi 15 juillet 2015

Serflex



Largement relayée par le milieu militant puis les médias de masse, la violence avec laquelle furent traités les migrants de la porte de la Chapelle n’est pourtant qu’un symptôme  d’une politique européenne la plupart du temps soutenue par ceux-là même qui en dénoncent les effets. Cette politique, peu soucieuse des causes, se concentre sur les moyens les ressources les processus qu’il serait urgent d’activer afin éviter à l’Europe, vieux continent peuplé de vieux, d’avoir à subir les assauts des déferlantes migratoires. Là-dessus : consensus. Les Fronts, National ou De Gauche, se retrouvent ici en la défense du coq aux ergots crânement plantés dans le Fumier Français. Consensus, pour ce qui est de notre incapacité à accueillir toute la misère du monde. Consensus, de fait, sur la nécessité urgentissime des reconduites à la frontières. Expulsons, dit Marion Maréchal Le Pen future présidente du futur État français, expulsons, ânonnent les indignés, nouvelle figure des curetons de base. Eux, de simplement rajouter : avec dignité

Rien, bien évidemment, n’est plus indigne qu’une expulsion, plus outrageusement violent que le Serflex serrant les poignets avant que le quidam ne soit chahuté sur le tarmac, bringuebalé, poussé du tonfa, pauvre viande, viande pauvre. Rien n’est, dans la réalité, plus révoltant qu’une expulsion, mot valise, sans mauvais jeu de mots, recouvrant un ensemble de pratiques policières héritées des plus noirs cauchemars. Au regard des tenants de la démocratie sociale-libérale il importe peu, finalement, de voir ainsi l’humain rapproché de la marchandise, du fret. Expulsons, disent-ils, mais  raisonnablement. Expulsons non sans une certaine courtoisie. Expulsons, mais à la française.  Si nous fermons la porte, c’est en évitant de la claquer, et en souhaitant bonne chance à ces malvenus visiteurs. Quand nous les invitons à quitter notre territoire, nous nous assurons, dans le même temps, que chacun d’entre eux soit munis  d’une bouteille d’eau et de quelques gâteaux secs, symboles de notre humanité. 

Dénonçant les violences de la porte de la Chapelle, nous ne cessons de faire le jeu des autorités elles, toutes entières dévouées au maintien de l’ordre des choses, à sa conservation. Nous pensons, de cette façon, et une fois dénoncée la nature indécente des violences policières commises sur les migrants, nous en tirer sans nul dommage. Jamais les indignés ne pousseront leur indignation jusqu’à admettre que ces violences sont corrélatives d’un régime dont ils ne questionnent plus les fondements. Le service républicain minimum assuré, ils peuvent alors, sans nulle vergogne, s’en retourner fanfaronner sur les plateaux télé, lieux de haute prostitution.

 Pendant ce temps les barques peuplées de milliers de migrants fuyant la mort, la guerre, la misère et le crime, continueront de se fracasser sur les murs de nos risibles forteresses. Et le déni, de régner, grand saigneur. Et nous ne cesserons d’échanger au sujet du danger ou de la chance, selon, qu’incarnent les flux migratoires. Il n’y a ni chance, ni danger. Il y a flux, point barre. Il y a qu’on cogne à la porte. Que le gardien, non seulement a perdu les clefs,  mais surtout ne s’est pas rendu compte de l’absence de murs.
Il serait alors urgent de ne pas essayer d’en construire un nouveau.

                                                                                                                                                    Ladrisse.   

jeudi 28 mai 2015

Jean-Paul II, gros concassé





Oh Paulo, quoi de nouveau ? Bien sûr il y eut Daesh, les massacres au soleil levant qui, ici et selon la formule consacrée, en touchèrent une sans faire bouger l’autre. Parce qu’ici, dans le même mouvement, les objectifs étaient braqués sur des élections sitôt achevées qu’oubliées, comme en Grèce, en Espagne, bien que de ces dernières on ne causât guère longtemps, puisque rude est l’Ibère. Quoi d’autre ?  Zyed et Bouna, relaxe des flics assassins, peinard le permis de tuer, jugement définitif, dans tous les sens du terme, comme par lui est rappelé une nouvelle fois aux Quartiers l’obligation qui leur est faite de croire en la justice racialiste de leur pays (1). Ce même pays, une semaine plus tard, irait, commémorant en grande pompes funèbres et à grand renfort de Panthéon même pas décousu l’esprit de résistance… Cherchez, l’erreur est inhumaine.

Autant de hoquets et hochets merdiatiques à souhait, qui cependant ne risquaient guère de prendre en défaut l’acuité l légendaire de l’autruche, sa singulière capacité à saisir, dans le fracas de l’actualité, l’essentiel, le nodal, la subastan-mirifique moelle. Vous l’aurez compris : nous parlons de la destruction de Jean-Paul II. Ou de sa statue, ce qui revient au même. 

Cette horreur absolue, œuvre du statuaire russe Zourab Tsereli (moujik échoué en terre bretonne : il est grand le mystère de l’immigration psychotique), trônait en pleine place publique en la mièvre ville de Ploërmel, Morbihan, 56800. La Libre Pensée demandait son retrait de la voie publique. Le tribunal de Rennes lui a donné raison, tout du moins en partie : l’immense croix surplombant sa Sainteté devra disparaître, et amen.

Aussitôt le maire de la bourgade a averti : « si nous enlevons la croix, l’auteur peut nous attaquer ». En effet : le tailleur de béatifiés a déjà prévenu qu’il s’opposerait « à toute modification de l’ensemble », appuyé en cela par le collectif de défense de cette abomination, baptisé du nom drolatique de « Touche pas à mon pape ! ». Quel dénouement attendre, en cette bien triste affaire, clochemerlienne à souhait ? Les paris sont aussi ouverts que la Sainte Soutane, battue par les vents de grande marée.

Plutôt que de vouloir ménager la chèvre laïque et le chou vaticaniais, le tribunal eût été bien inspiré de s’en remettre à un jugement autrement plus radical, consistant en la destruction, par tout outils adéquats, marteau, bines, explosifs divers, de la statue de Karol W. Coup de masse dans sa face, broyage, piétinage, concassage grossier de son corps et âme et re-amen, réduction à l’état de gravillons pour route et parkings de ses plus vils attributs, eut été sage, et nuancé eut égard au vingt millions de morts causés par le Sida, en 20 ans, en Afrique sub-saharienne. « La seule façon de se préserver contre le fléau du Sida, ce sont la chasteté, et la fidélité dans le mariage. Il faut que nous soyons résolus à préparer des générations saines. Il est de votre devoir de fortifier votre volonté. » Ainsi s’exprimait, en Afrique, Jean-Paul 2, coupable de crimes contre l’humanité, et néanmoins béatifié. Il est grand le mystère de la foire aux vanités. 

     Ladrisse  
                                                                                                                                             

  
(1) Au moment même où s’écrivaient ces lignes, Estrosi, maire de Nice, Sarko-Le Péniste assumé, affirmait que juste avant de pénétrer dans le transformateur Syed et Bouna étaient en excès de vitesse… Alors que chacun sait qu’ils étaient à pieds.               

dimanche 15 mars 2015

Il y en a un peu plus, je vous la mets dans le Gourmet Bag ?



Oh djeun, faignasse, au taf ! Au turbin, au chagrin ma poule ! Move your ass, asshole… Tel semble être le message délivré par ces empafés d’enfoirés, belle brochette de parvenus, de rassis et d’aigris devant lesquels le père Faust se pourlèche la lippe : ça voudrait pas crever, les Goldman et autres Merad, une fois passé la cinquantaine ça vendrait son père et sa mère et son cul pour un peu de jeunesse. « Vous avez toute la vie, c’est une chance inouïe ! », meugle la meute, aux portes de la morgue. Le chéquier ne fait rien à l’affaire : je, tu, ils vont crever. Alors, en un ultime tour de piste, autant cracher sa morgue et sa haine à la face des ados : « je rêve ou tu es en train de fumer ? » lâche le nanti, avant d’enfin avouer sa hargne, son moteur : « j’envie tellement ta jeunesse ». Eh oui, ah ah, le temps passe, on va fermer monsieur, faut partir, faut pas rester là.

Le même plumitif qui déclara éteinte la polémique autour des enfoi-enculés (de quel droit ? Pour quelles raisons ?) usa bientôt de sa chronique pour nous informer de l’ultime révolution en matière de pratiques bècebège, le « gourmet bag ». Un modèle de doggy, moins sac plastique quoi, plus smart, plus 8e arrondissement mais toujours destiné à emporter les restes, les os de poulet et le gras, pour les sucer chez soi. Vous voyez le rapport ? Non ?  

Mais, tandis que la Montespan se faisait emballer la bite à Talleyrand pour la finir chez elle, le site de Sivens était, lui, évacué et vite fait. Comme prévu. Comme l’infinie stupidité et/ou la puissance mortifère du Pouvoir le laissaient présager. Après des semaines de pressions, de tensions, d’agressions diverses et pas tellement variées (la plupart orchestrées par les industriels de l’agroalimentaire et leur milice privée la FNSEA), la gendarmerie surarmée n’a eu qu’à lui mettre une pichenette pour que s’écroule le campement. Que reste-t-il aujourd’hui du mausolée de Rémi Fraisse ? Un tas de cendres assurément, tant l’urgence est l’oubli.

Une société de régression doit veiller à développer sa capacité à l’oubli. L’individu doué de mémoire figure ici le résistant. Nous développons la nôtre.

Aussi n’avons-nous oublié ni Rémi ni Malik, ni Zyed, Bouna, Fanny Dewerpe, Daniel Féry, Eugène Varlin, tant d’autres, tombés sous les matraques taser flashball grenades ou balles.
De même, nous saurons nous souvenir d’un certain J.B. Marteau, journaliste de son état, chargé par France2 de commenter l’évacuation de Sivens. En voix off et sur les images des camions blindés de gendarmes à la mobilité malheureusement peu réduite : « le débat, oui, mais dans le respect des règles : c’est ça aussi, la démocratie ». Il a l’air finaud le Marteau, à asséner sa leçon de choses après des semaines de black out médiatique, sans un mot au sujet des exactions commises, sur site, par les forces de l’ordre et autres supplétifs ramenés là par cars entiers ! Que la langue de pute de Marteau et des autres plumeux retourne lécher, même pas râpeuse, l’anus des maîtres des forges!

Gageons que nous verrons, dans la semaine à venir, le même Marteau enfoncer le clou électoral, comme le grand cirque, le guignol est, parait-il, de retour en ville. Près d’un électeur sur trois s’apprêterait cependant à bouder le plaisir de bourrer l’urne, laquelle sait pouvoir compter sur Marteau pour nous rappeler LA règle, comme la rappelait, justement, il y a quelques mois, un pro-barrage : « la démocratie, c’est le dimanche, dans les urnes ». Et le lundi c’est raviolis ? Air connu… 

La Règle étant ce qu’elle est : un morceau de bois, ou de métal, rayé de traits réguliers, objet contondant s’abattant sur nos doigts boudinés, la Règle se devant d’être en toute chose respectée, une palanquée de caprinés s’en ira donc brouter l’herbe des bureaux de vote, geste pieu, dénué de sens. La mascarade ne tient plus, pure superstition. Le même public fait la même queue pour voter ou gratter un millionnaire le vendredi 13. Les élus, gourous envapés, ne manqueront pas de fêter comme il se doit la grand’messe. Nous n’y assisterons pas. Qu’ils trouvent ailleurs leurs enfants de chœur. Il y en a un peu plus, je vous la mets dans le cul quand même ?

Et c’est ainsi que Charlie est grand.
Ladrisse              

vendredi 27 février 2015

La peste ou le Nutella.



Le rêve grec aurait donc vécu... Celles et ceux qui, à l’instar du volatile, étaient demeurés éveillés, insensibles aux fumées ravalées dévalées de l’Olympe démocratique, s’étonnent malgré tout non tant de la violence de la réaction troïkienne, mais de la diligence avec laquelle elle fut menée. Pour le moins, ça n’a pas traîné, tant et si bien que, de cette illusion, nous retiendrons surtout l’éphémère, le fugitif. Pour le reste, c’est depuis bien belle lurette que le barnum électoral a rejoint la boîte à soupirs, au même titre que l’ubuesque oxymoron de la révolution par les urnes. Laissons à leurs fantasmes d’enfants celles et ceux qui prétendent vaincre le choléra en usant de la peste, aussi sûrement qu’on vient à bout du cholestérol via la consommation massive de Nutella. 

Dans les faits, à Athènes comme à Paris, l’hémicycle n’est jamais que le lieu du guignol, théâtre d'ombres destiné à endormir notre méfiance, à éviter que notre regard se porte sur les lieux où se joue l'essentiel. Et si jamais le vote signale un commencement de rébellion, la machine se met en branle et broie l’espoir, à la racine : des semaines, des mois que nombre d'électeurs de Hollande répètent à l’envi qu'ils n'ont pas voté à gauche pour se retrouver, au final, avec une politique de droite, incarnée par la loi Macron ? La contestation enfle, jusque dans les rangs du Ps? On dégaine le 49-3, façon crasseuse de s'asseoir sur les électeurs, éternels dindons de cette farce. 

Il arrive néanmoins que les dindons s’ébrouent. Qu’ils remuent leurs fesses vaselineuses et glougloutent leur lassitude. Leur foi en l’élection s’étiole, et se corrompt : dans son édition du 15 mars, le Journal du dimanche rapportait qu’aux prochaines échéances l’abstention avoisinerait les 60%. Le chiffre n’est pas anecdotique. Mais, plutôt que d’en signaler l’importance, plutôt que de relever, en bonne intelligence, le fait que désormais  une large majorité d’électeurs refuse de participer et donc de légitimer le grand carnaval des faux-culs, les plumeux entonnent la vieille scie de la responsabilité-culpabilité de l’abstentionniste à qui on devrait, paraît-il, la montée du Front National – étrange arithmétique permettant, au passage, de dédouaner ceux votant Le Pen. 

Au tromblon du 49-3, exhibé lors des débats sur la loi Macron, ont répondu comme en écho les flashballs et autres canons à eau entrés en action ce samedi, à Nantes et à Toulouse. Lors de ces manifestations de soutien aux ZAD menacées, étaient également dénoncées les violences policières devenues, ces derniers mois, monnaie courante. Désireuses, probablement, d’en fournir de nouveaux exemples, les forces dites de l’ordre ont chargé sans ménagement le cortège des Rémi, sans aller, pour cette fois, jusqu’à l’assassinat. Loin des dérapages que nous servent à chaque fois les medias en guise d’alibi aux coups de tonfa en pleine gueule, l’attitude de la gendarmesque procède moins de l’improvisation que de l’application d’une stratégie consciente, réfléchie, de banalisation de la violence policière. Nous savons désormais que nous pouvons mourir en manifestation. Que nous pouvons perdre un œil, nous retrouver défiguré, à la suite d’un rassemblement pacifique. Que la baraque en bordure de ZAD, dans laquelle sommeillent une dizaine d’occupants, peut être incendiée en pleine nuit. Couverts par une chaîne de commandement conduisant aux jardins de l’Elysée, les soudards de la Mobile, munis de ce permis de tuer, ne se priveront pas d’en user. Le seul fait d’entre être informé devrait suffire à nous dissuader, à l’avenir, de toute résistance, et donc à voir mourir les ZAD, faute de combattants. 

A les éliminer, d’autant plus sûrement que le climat général s’y prête, que l’opinion publique, matraquée de propagande, serait désormais disposée à soutenir le massacre de nos illusions. On nous dit que les Français, depuis Charlie, aiment leur police. Qu’ils leur offre des fleurs. Que, de Charonne à Rémi Fraisse, en passant par Bouna, Zyed, Malik,… tout serait pardonné, oublié. Voir. Le murmure qui sourd à l’arrière des bazars, dans les kebabs, aux arrêts de bus, aux pieds des tours, contredit ce bel unanimisme. Les éventuels supplétifs aux forces de police seront à trouver ailleurs. Nous fêterons bientôt, dans le feu, les dix ans des émeutes. Gageons que, d’ici là, les occasions seront nombreuses de dénoncer les agissements des bourrins de la BAC et celles de leurs cousins des milices municipales.

Et c’est ainsi que Charlie est grand.

                                                                                                                                   Ladrisse