Le pacte des loups
Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ?
Vociférations dans les rues et vociférations de salon, étant bien
entendu que les unes rejoignent les autres, ne s’en démarquent, et à
grand peine, que par les méthodes employées et les espaces où se
déploient une haine, elle, partagée. Commençons par la rue, avant
d’emprunter le couloir conduisant aux salons. Dimanche 26 janvier, dans
les avenues parisiennes, on a vu se déployer un cortège conséquent et
logique, sous le titre générique de « jour de colère ».
Sous cette appellation se sont réunis, coude à coude, les fébriles
marionnettes du « printemps français », les agités de la chasuble,
Civitas et consorts, main dans la main les intégristes et les néonazis
au premier rang desquels le Bloc Identitaire, dissous mais reconstruit.
Etaient évidemment présents les « dieudonnistes » adeptes de la quenelle
à tout crin, un geste « pas antisémite, mais antisystème »
selon monsieur Dieudonné M’bala M’bala. Un geste qui, cependant,
récupéré par l‘extrême droite, semble avoir pour le moins échappé à son
créateur. A moins que ce ne soit volontaire ? Bref, entre Bastille et
Invalides, ce dimanche 26 janvier les choses furent enfin clarifiées. On
voit mal désormais comment les thuriféraires de « la manif pour tous »,
ayant accepté de défiler avec l’ultra droite et les représentants de la
pire engeance catho traditionnaliste, pourraient encore se réclamer
d’un apolitisme bon teint. Idem pour les pro-vies, présents en masse : « arrêtez de nous avorter », proclamait une banderole infecte, sous entendant que l’IVG ne pouvait être une affaire de choix.
Quoi qu’il en soit, merci à eux. Merci de s’être acoquinés et de fournir enfin, à ceux qui en doutaient, une photographie moins floue de la France rance, de la France d’hier et d’avant-hier, de cette France mâchant ses cadavres et s’obstinant à les cracher sous la forme de « printemps français » à la face de tout ceux pour qui l’Histoire ne s’est pas arrêtée en 1954. L’ennemi change d’apparence, il n’en demeure pas moins l’ennemi. Traditionnalistes catho, identitaires, manif pour tous, même combat. On le savait, de long temps : ce dimanche, dans la rue, ils n’ont fait qu’apporter la preuve, irréfutable cette fois, d’une idéologie extrême-droitière partagée.
Pendant ce temps, en les salons de cette république bananée nommée par commodité « France », Gattaz number one du Medef comme avant lui son père (n’est-elle pas splendide cette transmission filiale du bâton de maréchal ?), Gattaz, donc, double la mise : heureux gagnants d’un lot de trente milliards d’euros octroyé par l’état dans le cadre d’un « pacte de responsabilité » n’ayant de pacte que le nom, les patrons exigent désormais que leurs gains soient doublés. « L’économie française est asphyxiée, ne fonctionne pas », avance le margoulin. Et ta sœur, elle est asphyxiée, et ta mère elle fonctionne pas ? « Il n’y aura de créations d’emplois que si rapidement des mesures fiscales et sociales se mettent en place », poursuit Gattaz, sûr de son fait, poussant son avantage. On ne saurait lui donner tort : le fils de son père Gattaz est payé pour défendre le patronat, extorquer à l’état c'est-à-dire vous et moi le plus de pognon possible. On lui refile 30 milliards ? Il en demande le double. Et prévient : « n’attendons pas de mesures presse-bouton pour créer de l’emploi demain. La clef de voûte de tout le dispositif, ce sont les dépenses publiques. » Décodage : ne comptez pas sur nous pour respecter le pacte, des emplois nous n’en créerons pas, nous demandons le double de ce qui nous fut octroyé en matière d’aide par Hollande et sa bande chiffes molles, nous demandons surtout qu’on privatise ce que les ringards continuent d’appeler « services publics », nos cartons sont blindés d’idées permettant de se faire un max de thunes dans le registre de la santé, de l’éducation, du troisième âge, de la police, des prisons,…
Il semble que le répéter, de mois en mois, d’année en année, ne serve à rien. Cependant recommençons. Trente ans de cadeaux faits aux entreprises et aux patrons n’a pas une fois, pas une seule, permis de faire baisser le chômage. C’est que l’entrepreneur n’a rien d’un philanthrope. Il n’aime rien tant que le pognon, la fraîche, l’oseille, l’argent. Il prend la thune d’où qu’elle vienne, le reste ne le concerne pas. Et de la thune, du pognon, il n’en a jamais assez. Aussi est-il assez doué pour chialer se morfondre et menacer : je vais vous payer moins, les gars, sinon je ferme et basta. Le chantage lui rapportera quelques centaines d’euros, toujours bons à prendre pour payer l’école privée des gosses ou le séjour à Meribel.
En un mot comme en cent : ce pacte dit « de responsabilité », n’impliquant aucune sorte de contrepartie pour le patronat lequel bénéficiera, à minima, d’un cadeau de trente milliards d’euros, ce pacte ouvrant la porte aux loups ayant désormais tout loisir de croquer les agneaux, n’est rien moins qu’un définitif baissement de culotte du pouvoir devant le patronat. Ce que Sarkozy n’a pas osé, certainement par faute de temps, Hollande l’a accompli. Nous ne l’oublierons pas.
Autrement ? Dans le registre des clowneries on me murmure dans l’oreillette que les anciennes « zones d’éducation prioritaire » seront, sous peu, rebaptisées « réseau d’éducation prioritaire ». On imagine sans peine ce que ce changement d’appellation impliquera comme bouleversements dans la vie de Mamadou M’baye, élève de troisième au collège Jean Jaurès, 93400 Saint-Ouen.
C’est que d’autres existences, bien que moins chamboulées sur le fond, réclament davantage l’attention des médias : on nous tartine ainsi depuis des jours et des jours avec la Trieweiller, dont on se fiche au même titre qu’une Carla Bruni. Ou d’une Bernadette Chirac, laquelle, pathétique, s’essaie encore à exister sous le mode de la solidarité entres femmes trompées, apportant ainsi son soutien à l’ex-meuf de Hollande. Et Bernadette Chirac, née Chodron de Courcel, d’ajouter tout à fait fielleuse qu’elle pensait, en 2012, que « François Hollande n’avait pas le gabarit d’un président de la république, mais maintenant il a changé. » Trompez votre compagne, montrez-vous bien macho : vous aurez le gabarit.
Frédo Ladrisse.
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Quoi qu’il en soit, merci à eux. Merci de s’être acoquinés et de fournir enfin, à ceux qui en doutaient, une photographie moins floue de la France rance, de la France d’hier et d’avant-hier, de cette France mâchant ses cadavres et s’obstinant à les cracher sous la forme de « printemps français » à la face de tout ceux pour qui l’Histoire ne s’est pas arrêtée en 1954. L’ennemi change d’apparence, il n’en demeure pas moins l’ennemi. Traditionnalistes catho, identitaires, manif pour tous, même combat. On le savait, de long temps : ce dimanche, dans la rue, ils n’ont fait qu’apporter la preuve, irréfutable cette fois, d’une idéologie extrême-droitière partagée.
Pendant ce temps, en les salons de cette république bananée nommée par commodité « France », Gattaz number one du Medef comme avant lui son père (n’est-elle pas splendide cette transmission filiale du bâton de maréchal ?), Gattaz, donc, double la mise : heureux gagnants d’un lot de trente milliards d’euros octroyé par l’état dans le cadre d’un « pacte de responsabilité » n’ayant de pacte que le nom, les patrons exigent désormais que leurs gains soient doublés. « L’économie française est asphyxiée, ne fonctionne pas », avance le margoulin. Et ta sœur, elle est asphyxiée, et ta mère elle fonctionne pas ? « Il n’y aura de créations d’emplois que si rapidement des mesures fiscales et sociales se mettent en place », poursuit Gattaz, sûr de son fait, poussant son avantage. On ne saurait lui donner tort : le fils de son père Gattaz est payé pour défendre le patronat, extorquer à l’état c'est-à-dire vous et moi le plus de pognon possible. On lui refile 30 milliards ? Il en demande le double. Et prévient : « n’attendons pas de mesures presse-bouton pour créer de l’emploi demain. La clef de voûte de tout le dispositif, ce sont les dépenses publiques. » Décodage : ne comptez pas sur nous pour respecter le pacte, des emplois nous n’en créerons pas, nous demandons le double de ce qui nous fut octroyé en matière d’aide par Hollande et sa bande chiffes molles, nous demandons surtout qu’on privatise ce que les ringards continuent d’appeler « services publics », nos cartons sont blindés d’idées permettant de se faire un max de thunes dans le registre de la santé, de l’éducation, du troisième âge, de la police, des prisons,…
Il semble que le répéter, de mois en mois, d’année en année, ne serve à rien. Cependant recommençons. Trente ans de cadeaux faits aux entreprises et aux patrons n’a pas une fois, pas une seule, permis de faire baisser le chômage. C’est que l’entrepreneur n’a rien d’un philanthrope. Il n’aime rien tant que le pognon, la fraîche, l’oseille, l’argent. Il prend la thune d’où qu’elle vienne, le reste ne le concerne pas. Et de la thune, du pognon, il n’en a jamais assez. Aussi est-il assez doué pour chialer se morfondre et menacer : je vais vous payer moins, les gars, sinon je ferme et basta. Le chantage lui rapportera quelques centaines d’euros, toujours bons à prendre pour payer l’école privée des gosses ou le séjour à Meribel.
En un mot comme en cent : ce pacte dit « de responsabilité », n’impliquant aucune sorte de contrepartie pour le patronat lequel bénéficiera, à minima, d’un cadeau de trente milliards d’euros, ce pacte ouvrant la porte aux loups ayant désormais tout loisir de croquer les agneaux, n’est rien moins qu’un définitif baissement de culotte du pouvoir devant le patronat. Ce que Sarkozy n’a pas osé, certainement par faute de temps, Hollande l’a accompli. Nous ne l’oublierons pas.
Autrement ? Dans le registre des clowneries on me murmure dans l’oreillette que les anciennes « zones d’éducation prioritaire » seront, sous peu, rebaptisées « réseau d’éducation prioritaire ». On imagine sans peine ce que ce changement d’appellation impliquera comme bouleversements dans la vie de Mamadou M’baye, élève de troisième au collège Jean Jaurès, 93400 Saint-Ouen.
C’est que d’autres existences, bien que moins chamboulées sur le fond, réclament davantage l’attention des médias : on nous tartine ainsi depuis des jours et des jours avec la Trieweiller, dont on se fiche au même titre qu’une Carla Bruni. Ou d’une Bernadette Chirac, laquelle, pathétique, s’essaie encore à exister sous le mode de la solidarité entres femmes trompées, apportant ainsi son soutien à l’ex-meuf de Hollande. Et Bernadette Chirac, née Chodron de Courcel, d’ajouter tout à fait fielleuse qu’elle pensait, en 2012, que « François Hollande n’avait pas le gabarit d’un président de la république, mais maintenant il a changé. » Trompez votre compagne, montrez-vous bien macho : vous aurez le gabarit.
Frédo Ladrisse.
------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Heureux en amour.
Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ?
Beuglements, meuglements et crialleries diverses, comme à chaque nouvel
an. Bonne année, disent ceux qui s’en foutent, et surtout la santé,
rajoutent ceux qui veulent votre mort. L’hypocrisie est générale, de bon
aloi, obligatoire. Pour sa part l’autruche se contentera de lui chier
dans la bouche et de lui pisser à la raie, à ladite bonne année, non
sans vous souhaiter de tout cœur une excellente nouvelle révolution
solaire numérotée par paresse « 2014 ». Qu’elle soit pour vous
sucrée/salée, et secouée comme il faut.
Fin d’année, période des bilans. Ainsi Renaud Murail, gérant chez Barclay’s Bourse, nous rassure : « le marché n’est pas dans une phase d’euphorie mais va mieux. L’environnement est moins stressant qu’il y a deux ou trois ans. » On est content pour le marché. Et content pour Murail. Le même prédit par ailleurs que « le marché va rester dans un contexte de politique monétaire ultra-accommodant. » Chouette alors. Mais ça veut dire quoi ? Ça veut dire que les banques centrales, avec notre pognon, vont continuer de soutenir les marchés financiers, dans des dimensions dépassant totalement l’entendement. Ainsi, en 2013, la réserve fédérale américaine (la FED), aura acheté pour 85 milliards de dollars d’actifs, CHAQUE MOIS. A comparer avec les 11 milliards que pèse le trou de la Sécu. Et qu’on nous contraindra bientôt à combler avec les six centimes qui nous restent dans la poche. Mais ça n’a rien à voir !, tonitruent les Rapetou, devenus multimilliardaires. La bourse c’est la vie, alors que la santé c’est la mort ! La mort des pauvres, d’accord, mais quelle idée n’est-ce pas, que d’être pauvre et malade.
Il y en a, curieuses personnes, que ça amuse, l’espace de quelques jours, de jouer au pauvre comme on joue à la marchande, ou à la guerre. « Avis aux amateurs de week-ends culturels ! », annonce sans barguigner l’Express, avant de vanter un séjour au cœur de Soweto, bidonville par excellence de l’Afrique du Sud, celle d’hier, celle d’aujourd’hui. Bref, un hôtel pour blancs au beau milieu d’un ghetto noir, peuplé de quatre millions d’habitants : visite comprise dans le prix, dépaysement garanti ! Qu’il est doux, pour un Blanc ne sachant plus quoi faire de son argent, d’aller deux jours s’immerger dans la misère Noire… Et d’espérer que ses enfants auront bien retenu la leçon : Adolf, Astrid, avez-vous vu ces malheureux se battre pour un verre de lait ? Savez-vous pourquoi ils se battent ? Parce que le lait est blanc, papa, et que tout ce qui est blanc est bon. On peut reprendre du chocolat ?
En une autre contrée sauvage d’autres voyages sont organisés, ceux-là moins culturels, et parfois sans retour. Il s’agit, vous l’aurez deviné, du Japon trois fois millénaire (ou moins, ou plus, on s’en tamponne le kimono). Ça chie grave dans les réacteurs au pays du soleil levant, soleil ayant tendance à tourner couleur plutonium, d’un verdâtre à vomir. Trois ans après la catastrophe, la main d’œuvre se fait rare pour s’en aller balayer les neutrons dans les rues. De l’argent il en manque aussi, puisque cette salope de Tepco, boîte privée gérant la centrale, a décidé de ne pas payer le prix de la décontamination (« ce qui est tombé chez les gens appartient désormais aux gens », principe débile s’il en est, dont nous avions déjà parlé), et puisque l’Etat nippon a tenté de se substituer à Tepco sans garantie aucune en terme de sécurité et en payant mal l’ouvrier. On comprend que ça ne se bouscule guère aux portes de l’enfer nucléaire. Manque de personnel ? Pas d’inquiétudes, la mafia veille, en recruteur hors-pair. « On traîne ici avec nos sacs, on tourne autour de la gare, on est faciles à repérer », explique Shizuya, sans-abri japonais. Car c’est dans cette population que les yakusa recrutent, comme d’ailleurs ils l’ont fait dès le début de la catastrophe. Contre quelques billets ces pauvres gens montent dans un bus qui les conduira sans détour jusqu’à la zone rouge. Là, on les équipera d’un masque anti-poussière en tout point comparable à celui que vous utilisez lors de vos travaux de peinture, et tout aussi risible que le misérable balai qu’on placera dans leurs mains avant de les envoyer nettoyer les maisons, les rues, désertées depuis des années. « Vous cherchez du travail ? Vous avez faim ? On répond oui, et ils nous offrent un job », poursuit Shizuya. Y-a-t-il plus bel exemple de ce qu’on appelle fréquemment, et par facilité, le capitalisme sauvage (comme si il pouvait exister un « capitalisme docile », un capitalisme dressé, capitalisme « de compagnie » comme on dit d’un chat ou d’un chien) ? Laissons cette chimère à ATTAC et aux socialistes de droite, et rendons-nous à l’évidence : le capitalisme montre ici, dans le cauchemardesque « traitement » des suites de Fukushima, son visage le plus réaliste. Aussi s’étonne-t-on à peine d’apprendre que, selon le journaliste Tomohiko Suzuki, « les yakuza se tournent maintenant vers les handicapés mentaux et les personnes endettées. » Quoi, il est pas joli, le jeu du marché « libre et non faussé » ?
Est-ce jeu, cette loi du marché, qui amena Hollande à, une fois encore, changer de partenaire au milieu de la danse ? L’ancien régime n’est jamais loin des ors de la république, courtisanes, première dame et autres favorites. D’aucuns imaginaient, en écartant Strauss-Kahn, avoir évité le pire. C’est probable, ce n’est pas certain. Le satyre effacé, nous revoilà avec, à la tête de l’Etat, un désordonné séducteur contrôlant bien difficilement ses libidinales pulsions comme ses coups de cœur de jeune pré pubère. Certains voient là une mascarade, une mise en avant de la sensualité hollandaise, permettant de faire passer et comme en douce l’énorme cadeau que les socialistes s’apprêtent de nouveau à faire au patronat. 30 milliards de transfert des cotisations familiales, qu’il n’aura plus à débourser. Qui réglera la note ? Je vous laisse deviner. Ces 30 milliards venant s’ajouter aux 63 milliards d’aides aux entreprises que supportent déjà le contribuable, on comprend que le Medef se frotte les mains, et promette monts et merveilles, comme la création d’1 million d’emplois sur cinq ans. Voilà où nous en sommes : les citoyens pensent financer une éventuelle baisse du chômage de quelques points, sans plus, en sacrifiant leur niveau de vie, en acceptant de voir leurs salaires stagner depuis des années, autorisant l’Etat à leur faire les poches et à chercher bien au fond. Pendant ce temps les patrons encaissent les chèques, et demandent davantage d’efforts, sans rien promettre de concret. Ce « pacte de responsabilité » signé entre irresponsables, gouvernants et chefs d’entreprise, se veut en effet non contraignant. Or, il est une constante : depuis plus de trente ans, jamais aucun effort consenti par l’Etat et donc le contribuable à l’égard des patrons n’a produit le moindre effet durable en termes de baisse du chômage. Mais l’essentiel n’est-il pas que notre président soit heureux en amour ?
Frédo Ladrisse.
Fin d’année, période des bilans. Ainsi Renaud Murail, gérant chez Barclay’s Bourse, nous rassure : « le marché n’est pas dans une phase d’euphorie mais va mieux. L’environnement est moins stressant qu’il y a deux ou trois ans. » On est content pour le marché. Et content pour Murail. Le même prédit par ailleurs que « le marché va rester dans un contexte de politique monétaire ultra-accommodant. » Chouette alors. Mais ça veut dire quoi ? Ça veut dire que les banques centrales, avec notre pognon, vont continuer de soutenir les marchés financiers, dans des dimensions dépassant totalement l’entendement. Ainsi, en 2013, la réserve fédérale américaine (la FED), aura acheté pour 85 milliards de dollars d’actifs, CHAQUE MOIS. A comparer avec les 11 milliards que pèse le trou de la Sécu. Et qu’on nous contraindra bientôt à combler avec les six centimes qui nous restent dans la poche. Mais ça n’a rien à voir !, tonitruent les Rapetou, devenus multimilliardaires. La bourse c’est la vie, alors que la santé c’est la mort ! La mort des pauvres, d’accord, mais quelle idée n’est-ce pas, que d’être pauvre et malade.
Il y en a, curieuses personnes, que ça amuse, l’espace de quelques jours, de jouer au pauvre comme on joue à la marchande, ou à la guerre. « Avis aux amateurs de week-ends culturels ! », annonce sans barguigner l’Express, avant de vanter un séjour au cœur de Soweto, bidonville par excellence de l’Afrique du Sud, celle d’hier, celle d’aujourd’hui. Bref, un hôtel pour blancs au beau milieu d’un ghetto noir, peuplé de quatre millions d’habitants : visite comprise dans le prix, dépaysement garanti ! Qu’il est doux, pour un Blanc ne sachant plus quoi faire de son argent, d’aller deux jours s’immerger dans la misère Noire… Et d’espérer que ses enfants auront bien retenu la leçon : Adolf, Astrid, avez-vous vu ces malheureux se battre pour un verre de lait ? Savez-vous pourquoi ils se battent ? Parce que le lait est blanc, papa, et que tout ce qui est blanc est bon. On peut reprendre du chocolat ?
En une autre contrée sauvage d’autres voyages sont organisés, ceux-là moins culturels, et parfois sans retour. Il s’agit, vous l’aurez deviné, du Japon trois fois millénaire (ou moins, ou plus, on s’en tamponne le kimono). Ça chie grave dans les réacteurs au pays du soleil levant, soleil ayant tendance à tourner couleur plutonium, d’un verdâtre à vomir. Trois ans après la catastrophe, la main d’œuvre se fait rare pour s’en aller balayer les neutrons dans les rues. De l’argent il en manque aussi, puisque cette salope de Tepco, boîte privée gérant la centrale, a décidé de ne pas payer le prix de la décontamination (« ce qui est tombé chez les gens appartient désormais aux gens », principe débile s’il en est, dont nous avions déjà parlé), et puisque l’Etat nippon a tenté de se substituer à Tepco sans garantie aucune en terme de sécurité et en payant mal l’ouvrier. On comprend que ça ne se bouscule guère aux portes de l’enfer nucléaire. Manque de personnel ? Pas d’inquiétudes, la mafia veille, en recruteur hors-pair. « On traîne ici avec nos sacs, on tourne autour de la gare, on est faciles à repérer », explique Shizuya, sans-abri japonais. Car c’est dans cette population que les yakusa recrutent, comme d’ailleurs ils l’ont fait dès le début de la catastrophe. Contre quelques billets ces pauvres gens montent dans un bus qui les conduira sans détour jusqu’à la zone rouge. Là, on les équipera d’un masque anti-poussière en tout point comparable à celui que vous utilisez lors de vos travaux de peinture, et tout aussi risible que le misérable balai qu’on placera dans leurs mains avant de les envoyer nettoyer les maisons, les rues, désertées depuis des années. « Vous cherchez du travail ? Vous avez faim ? On répond oui, et ils nous offrent un job », poursuit Shizuya. Y-a-t-il plus bel exemple de ce qu’on appelle fréquemment, et par facilité, le capitalisme sauvage (comme si il pouvait exister un « capitalisme docile », un capitalisme dressé, capitalisme « de compagnie » comme on dit d’un chat ou d’un chien) ? Laissons cette chimère à ATTAC et aux socialistes de droite, et rendons-nous à l’évidence : le capitalisme montre ici, dans le cauchemardesque « traitement » des suites de Fukushima, son visage le plus réaliste. Aussi s’étonne-t-on à peine d’apprendre que, selon le journaliste Tomohiko Suzuki, « les yakuza se tournent maintenant vers les handicapés mentaux et les personnes endettées. » Quoi, il est pas joli, le jeu du marché « libre et non faussé » ?
Est-ce jeu, cette loi du marché, qui amena Hollande à, une fois encore, changer de partenaire au milieu de la danse ? L’ancien régime n’est jamais loin des ors de la république, courtisanes, première dame et autres favorites. D’aucuns imaginaient, en écartant Strauss-Kahn, avoir évité le pire. C’est probable, ce n’est pas certain. Le satyre effacé, nous revoilà avec, à la tête de l’Etat, un désordonné séducteur contrôlant bien difficilement ses libidinales pulsions comme ses coups de cœur de jeune pré pubère. Certains voient là une mascarade, une mise en avant de la sensualité hollandaise, permettant de faire passer et comme en douce l’énorme cadeau que les socialistes s’apprêtent de nouveau à faire au patronat. 30 milliards de transfert des cotisations familiales, qu’il n’aura plus à débourser. Qui réglera la note ? Je vous laisse deviner. Ces 30 milliards venant s’ajouter aux 63 milliards d’aides aux entreprises que supportent déjà le contribuable, on comprend que le Medef se frotte les mains, et promette monts et merveilles, comme la création d’1 million d’emplois sur cinq ans. Voilà où nous en sommes : les citoyens pensent financer une éventuelle baisse du chômage de quelques points, sans plus, en sacrifiant leur niveau de vie, en acceptant de voir leurs salaires stagner depuis des années, autorisant l’Etat à leur faire les poches et à chercher bien au fond. Pendant ce temps les patrons encaissent les chèques, et demandent davantage d’efforts, sans rien promettre de concret. Ce « pacte de responsabilité » signé entre irresponsables, gouvernants et chefs d’entreprise, se veut en effet non contraignant. Or, il est une constante : depuis plus de trente ans, jamais aucun effort consenti par l’Etat et donc le contribuable à l’égard des patrons n’a produit le moindre effet durable en termes de baisse du chômage. Mais l’essentiel n’est-il pas que notre président soit heureux en amour ?
Frédo Ladrisse.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire