"Hommes/femmes politiques, journalistes au petit pied, philosophes du dimanche ou stars à la ramasse: tous sèment des perles de bêtise, sans se douter que, dans l'ombre, l'autruche les note, les commente, s'en gausse, et recrache le tout sur ce blog."

Décembre 2010

Je décroche un peu, aujourd’hui

Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Hortefeux  bramer tel le pas beau veau nouveau né, en appeler, galéjade, à la présomption d’innocence, lui qui, à l’instar de son seigneur et maître, s’assoit dessus plus qu’à son tour. C’est qu’Hortefeux-nnec fait appel de la condamnation qui le frappe, entend donc par ce tour de passe-passe être encore et pour quelques mois tenu pour innocent. Cette condamnation, c’est rien moins que la seconde en six mois. Fut un temps cela aurait suffit à le rayer des cadres : autre époque, autres mœurs, dans l’empire (du Milieu) du Sarkozystan-pour-mille-ans, l’inconditionnel soutien du chef de l’état fait office d’hypra-passe-droit. Aussi Hortefeux-nouillard peut sans vergogne ni souci continuer de se livrer à ses sports favoris, l’injure à caractère raciste et la défense des flics véreux, comme il y a peu à Bobigny. « Ce ne sont pas les policiers qu’il faut mettre en prison, ce sont les délinquants. » C’est cela, oui, et inversement.
      Mais comment reprocher au rouquin ces quelques faux pas délétères, alors qu’il est, de jour, de nuit, en première ligne, sur tous les fronts ? Non content de devoir lutter contre cette saloperie de neige, plutôt, contre ces râleurs de Français refusant de se retrouver coincés pour la nuit dans leur bagnole par cinq petits centimètres de poudreuse, et alors même que le ministre pérore à la radio, non, « il n’y a pas de pagaille », il doit, par ailleurs, mettre les bouchées doubles quant aux expulsions de sans-papiers. C’est que, horreur !, les objectifs, cette année, risquent de ne pas être atteints. Aussi a-t-il dû exhorter les préfets à « accentuer l’effort », car d’ici le 31 décembre il leur faudra coûte que coûte trouver 2489 charterisables, afin de franchir la barre des 28000 expulsés et sabrer le champagne. « Communiquez sur les opérations », leur a-t-il conseillé, « pensez à la presse régionale, mais aussi à la radio et aux réseaux sociaux. » Les préfets ont ainsi été incités à créer des pages Facebook, et ont, à cet effet, reçu un petit manuel d’utilisation… Pour Noël, surprenez : offrez à vos proches un préfet comme ami sur TêtedeLivre.
      On déconne on déconne, et pendant ce temps-là d’aucuns, autrement plus lucides et graves, pavent l’enfer qui nous attend de leurs mauvaises intentions. Fillon : « nous incarnons pour les Français des heures difficiles. » On ne saurait mieux dire, pauvre Elvire. Le pire étant toujours pour demain, on aurait encore rien vu. Et Fillon de conclure, à l’adresse de sa majorité mais assez mystérieusement « bref, nous ne sommes pas dans la situation du jeune premier. » Baisse de régime, en ce moment, chez les fournisseurs « d’éléments de langage » ?  Peu importe, pour lui, au moins, les choses sont claires : « ils seront tous contre nous et tous contre le président de la république, il faudra donc former un bloc autour de Nicolas Sarkozy. » Ah oui ? Il serait donc candidat ? On nous cache tout…
      On nous cache tout mais on nous dit qu’on bouge encore, « je ne suis pas mort », tient à faire savoir Eric Woerth, « même si je décroche un peu aujourd’hui. » Woerth… C’est bizarre, c’est un nom qui me dit quelque chose. C’était pas quelque chose comme une marque de casseroles allemandes ?
      On nous cache tout mais on avoue que « naturellement, la réforme des retraites consiste à travailler deux ans de plus sans gagner plus. » Qui parle ainsi ? Sarko en personne, oui madame, et oui, non content de nous l’avoir mis grave, le voilà qui se moque, se paraphrasant sans vergogne. Au vu du peu de réaction émanant, en octobre/novembre dernier, des ectoplasmiques franchouilleux pleutres goitreux non grévistes à la masse voir à la ramasse, l’excité de l’Elysée aurait tort de se priver. Vous en voulez encore, du sarkopétainisme à la petite semaine, de la bonne vieille France bien rance à base de patrie, de famille ? Eh bien, voilà le travail : « si la vraie vie est en dehors du travail, c’est toute la société qui s’effondre. Le travail, c’est ce qui libère l’homme, ce n’est pas ce qui l’aliène. Quand on va au travail en se disant « je n’aime pas mon travail », je ne crois pas que les weekends soient très épanouissants. » Ainsi parla Sarko, dans une usine Snecma, le 13 décembre dernier. A quand la suppression pure et simple des weekends, « pas très épanouissants», au profit du travail qui, lui, « rend libre » ?
       Cependant, ce n’est pas parce que s’approche Noël, ce malfrat, qu’il faut déprimer à outrance — les boules de l’autruche sont de toutes saisons. Pas de dépression sous la neige, non, d’autant qu’apparaît là-haut, dans les cieux tel un aigle, Royal, dont le vol gracile domine toute morosité. « Je me suis mise en mouvement », délivre Ségolène. Puis, bougeant son corps mais lentement, la voilà qui devise : « nous ne sommes pas au service de la gauche, nous sommes au service de la France. » Hum. « Mon programme n’est pas socialiste », disait en 2002 Jospin… Enfin, moi, je dis ça je dis rien…
      Je dis d’autant rien que d’ici leur grand’messe 2012, il risque de s’en passer des choses, de s’en dérouler des coups de balai dans une Europe, rêvons un peu, résonnant au son des casseroles et des « que se vayan todos » et Mélanchon et Besancenot, pareils, oui, qu’ils se cassent TODOS. Je m’emballe ? A Londres la jeunesse ne lâche rien, ce ne sont pas, proprettes, nos manifestations de vieillards, ce sont, oui monsieur, pures émeutes. Athènes, Rome, connaissent pareillement en leurs centres historiques de ces feux de jeunesse, « du jamais vu », à ce qu’on en dit. En Espagne ça s’énerve aussi, de partout cela monte, ministre molesté (Rome), prince Charles pissant de frousse dans sa Rolls en plein Londres, lieux de pouvoir, partout, pris d’assaut, pouvoirs déconsidérés bien que très sidérés, les cons, militants, dans la rue, cette fois prêts à en découdre,… je m’emballe ? Non, pas de cadeaux, je déballe à froid : ça chauffe. Renseignez-vous.
      Jeudi 16 décembre, l’état de l’Oklahoma est drôlement embêté : il doit exécuter le condamné John Duty, par injection létale. Mais le produit habituellement utilisé se trouve être en rupture de stock. Qu’importe : l’ingéniosité, la débrouille, étant des valeurs bien connues de la grande nation étasunienne, on eut tôt fait de se procurer une dose d’anesthésiant vétérinaire, lequel fit parfaitement l’affaire. Joyeux noël à tous, et paix.
 


                                                                                                Frédo Ladrisse.


Trois causes et un décès

Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Holà, mais quel cirque ces derniers jours, c’est Bouglione et Zavatta à toutes les pages, les amis ! Ce sont, partout, phrases de haut vol, voltige cependant circoncise à l’horizon des pâquerettes, quand bien même les formules grondent, certaines tout en piqué, Stuka lancés sur des cibles néanmoins repérées avec ce qu’il convient de méticulosité : c’est qu’ils s’appliquent, les nouveaux, et, pareil, les repêchés du remaniement. Sous leurs fards les clowns blancs cachent mal la nécessité dans laquelle ils sont de faire leurs preuves. Il n’est qu’à écouter le petit Baroin-oin, tout frais moulu ministre, pichenetter et descendre en torche l’énorme, l’incontournable, l’excellentissime phare de la pensée contemporaine qu’est Eric Cantona, et sa révolution bancaire : « monsieur Cantona, on le sait, est un très bon joueur de football », commence Baroin-le-chafouin. « Cependant, à chacun son métier, et les vaches seront bien gardées. » Je ne sais pas vous mais moi, j’en ai d’un coup perdu mes plumes, jusqu’à me sentir subitement bêtement ruminant.
     A peine avais-je eu le temps de mâchouiller l’herbe des prés qu’un dénommé Védrine, Hubert, repassait une couche dans le registre de l’outrecuidance, genre l’hautain qui s’assume. Ce type, dont on nous dit qu’il est né dans la Creuse, et qu’il fut ministre de la France des affaires étranges sous le règne de Jospin — toutes choses qu’on veut bien croire, mais bon… —, ce type, était interrogé à propos des révélations fournies par Wikileaks à la presse internationale — on y revient, plus bas. S’agissant de la pertinence, ou non, de l’application du principe de transparence, Védrine crut bon de préciser qu’ «on ne parle pas aux enfants comme on parle aux grandes personnes. » Je ne sais pas vous, mais moi, j’en suis comme sur le coup retombé en enfance, jeune autruchon pubère s’ébrouant dans la brousse, innocent, ignorant : un con. C’est assez ce que nous sommes, pour ces gens, vous ne croyez pas ? Des vaches, des enfants. Autrement dit des cons, qu’on promène en troupeau.
     Il est d’autres troupeaux, pour les Védrine, Baroin et consorts, au hasard : l’Afrique et ses peuples. Il n’est qu’à lire les commentaires concernant, en ce moment, la situation ivoirienne, pour mesurer dans quel mépris ces peuples continuent d’être tenus par cette espèce d’instituteur père fouettard profiteur mégalobarbouzard qu’on appelle l’occident. « Gbagbo, Ouattara, en tout cas la communauté internationale a fait son choix », claironnait l’autre soir ce trouduc de Delahousse, journaleux au brushing parfait, sorte de Baroin mais en blond. Kézako ce machin, la « communauté internationale » ? Est-ce le Swaziland, la Serbie, l’Argentine, le Kazakhstan ? Que nenni mon copain, nous savons tous ce que recouvre cette appellation contrôlée — de près, de très très près—, comme nous savons ce que signifie l’information selon laquelle elle aurait fait « son choix ». Reste à vous y plier, les nègres, parce que pas question que vous nous emmerdiez plus longtemps avec vos histoires locales, les affaires sont les affaires et donc, vos affaires sont nos affaires, le bizness attend pas, compris?                                                                                                             
     Cependant, et pour la grande joie des enfants-vaches-autruches que nous sommes, un petit caillou vient parfois se glisser dans les Rangers de cette « communauté internationale », gourgandine à deux sous la passe. Ça la grattouille, la pauvre, puis ça lui blesse le talon, ce qui est déjà ça. Le caillou du moment se nomme Wikileaks. En voilà du wiki sympa, du comme on l’aime, du bon petit web 2.0 prompt à semer sa zone, du craquage top niveau aussi, de celui qui fait suinter les gouvernementales aisselles ! Wikileaks balance tout azimut depuis deux semaines, et si par lui on apprend que Sarkozy est jugé par la diplomatie américaine comme « autoritaire, susceptible et imprévisible»  — allons donc… — ce n’est pas, et de loin, l’essentiel : d’autres secrets d’alcôves autrement plus embarrassants furent également publiés, d’où les cris d’orfraie émanant de tout ce que les réceptions de monsieur l’ambassadeur compte comme langues bien fourchues, cependant habituées à ne s’agiter qu’en loucedé. Et d’où l’arrestation, hier, du fondateur du site, lequel avait aux fesses rien moins qu’Interpol, s’il-vous-plaît. Depuis, ça gueule moins, cependant ça eut gueulé. Pour Sarkozy, évidemment, vu qu’il est dit trop de vilain et du pas beau sur lui, Wikileaks a atteint « le dernier degré de l’irresponsabilité. » Et c’est rien de dire qu’en la matière, Sarko maîtrise le sujet. Quant à son valet de pied, par ailleurs ministre de l’intérieur, il estime que « parfois, la transparence est une forme de totalitarisme. » Bigre! Il faut croire que dans l’esprit malade et quelque peu schizo d’Hortefeux-de-Bengale, tout doit dépendre à qui cette transparence s’applique. Car enfin, n’est-ce pas lui et ses complices, partisans du fichage, de l’adn-isation de la population, de la vidéosurveillance et du flicage sans restrictions qui demeurent, il me semble, les premiers supporters, et ô combien farouches, de ladite transparence ? Mais il suffit que quelqu’un vienne renifler leurs chaussettes pour que, subitement, ces baltringues s’en offusquent…
     Leur pire cauchemar? Un Wikileaks « à la française ». Aussi vont-ils, dans l’affolement, revoir la sécurisation de leurs communications. D’ici là, on aura sûrement l’occasion de rigoler encore, en lisant le contenu de notes fuitées comme on dit, car vu le retard pris en matière de « sécurisation », elle est pas pour demain la veille : selon un conseiller de not’président, « il faut trouver notre Samuel Morse. » Et pour l’envoi des pneumatiques, c’est Géo Trouvetou qui s’y colle ?
     Une, qu’il conviendrait de « sécuriser » de toute urgence, c’est la Royal Ségolène. Elle n’a pas pu se retenir, la voilà donc candidate à la candidature, et ceux qui la pensaient quelque peu sous contrôle en sont tout retournés. Pour autant, l’allumée poitevine n’a pas agi sur un coup de tête, ni même de menton, non non. Il s’agit là, qu’on se le dise, d’une décision réfléchie, et pas seulement par son miroir. « J’ai beaucoup consulté », précise ainsi Ségo, sans dire si le psy prenait cher. Ni s’il avait Montebourg, également, comme patient, Montebourg, à qui un journaliste demandait l’autre jour la nature de son programme, et qui eut cette réponse, abracadabrantesque en diable : « tout est dans le livre que j’ai écrit il y a quelques mois, etd’ailleurs, on me dit qu’il est lu. » Les mauvais esprits demanderont le nom et le prénom du lecteur, nous, on en restera là concernant le Ps, étant bien entendu qu’un kilomètre à pied, ça use, ça use. Après une campagne d’un an et des brouettes sans roues, faudra voir l’état des souliers.
     S’il convenait de rassurer les marcheurs en chaussures à clous du Parti socialiste — mais, en ce qui concerne l’autruche, il convient rien du tout, queue dalle, que les sociaux-traîtres s’embrouillent, se débrouillent, continuent de s’empêtrer, de s’emmêler, de s’emmerder au sens premier du terme, peu lui chaut, ah ah, peu lui chaut !— s’il fallait, donc, leur fournir quelque chose comme une lueur, un espoir, un truc genre sortie de tunnel sur l’A86 eh bien, oui, nous avons ceci en magasin : le 30 novembre dernier Sarko avouait à des parlementaires : « je suis là pour deux mandats, pas plus. Après, ce sera plus tranquille, ce sera la dolce vita. » Plus tranquille pour nous ? Peut-être. Dolce vita pour lui c’est sûr, à la mode Berlu hein, son modèle dans la vraie vie : du fric, de la came et des putes.
       Quoi qu’il en soit les fiers candidats du PS, qui ainsi risquent fort de devoir attendre cinq ans de plus, doivent voir là leur salut : Nicolas Sarkozy ne sera pas candidat en 2017 —il l’a promis à sa greluche. Cinq ans, ça passe vite. Non ?
     La dolce vita, disait-il : elle ne saurait être à l’ordre du jour pour les smicards et smicardes, au nombre de près de 4 millions, soit 16 % des salariés au pays du « gagner plus ». Le traditionnel « coup de pouce » du premier janvier se limitera, une fois de plus et pour la cinquième année consécutive, au minimum légal, soit 1,6 %. Bonheur d’entre les bonheurs, le Smic devrait donc franchir, au matin de la nouvelle année, la barre symbolique des 9 euros bruts de l’heure. Merci qui ? Merci mes couilles, oui, en net ça donne un fier salaire de 1080 euros. Vous avez dit bonnes fêtes ? Bonnes fêtes pour qui, au juste?
     Il y a pire, il y a toujours pire : il y a plus gravissime encore, il y a qu’on continue à tuer dans ce pays, il y a que les flics, quand ils ne flashballent pas, tasent. Dépêche de l’agence Reuters, le lendemain du drame de Colombes: « le Malien victime du Taser est décédé par asphyxie. » Il serait donc mort d’avoir cessé de respirer, merci pour cette info cruciale. Par ailleurs, et selon le parquet de Nanterre, « il n’y a pas, à ce stade, de cause certaine et absolue » concernant son décès. Il était sans papiers. Il avait la flicaille au cul. Il s’est pris deux décharges. Ça nous fait déjà, ça, trois causes, aussi absolues que certaines.


                                                                                                 Frédo Ladrisse.
 

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