"Hommes/femmes politiques, journalistes au petit pied, philosophes du dimanche ou stars à la ramasse: tous sèment des perles de bêtise, sans se douter que, dans l'ombre, l'autruche les note, les commente, s'en gausse, et recrache le tout sur ce blog."

Février 2014

La honte

Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? Tandis que François-le-maudit traversait l’Atlantique en compagnie d’Yvon Guattaz, son poteau du Medef, tandis qu’il s’en allait en quelque ville western claquer la bise à Carlos Diaz, meneur des Pigeons, mais si, souvenez-vous : cette clique entrepreneuriale sans reproches mais animée de peurs ancestrales, l’impôt pas bien, le code du travail beurk, rétablissez-nous l’esclavage, le taillable et le corvéable, ou sinon nous fermons boutique… tandis que Hollande-de-pute offrait sa langue habile aux culs des connétables et autres « forces vives » dont on ne sait que trop la mollesse en matière salariale, mollesse inversement proportionnelle à l’appétit qu’ils montrent pour les aides publiques… tandis que François, cancre mou et chancre aux multiples prurits libéraux, tandis que la présidentielle girouette vantait le vent de Palo Alto on apprenait, de ce côté ci du vieux monde, qu’un gel du salaire des fonctionnaires, ces fainéants, ces profiteurs, ces nantis payés à rien foutre, dormait dans le carton à projets d’un gouvernement socialiste lequel, ayant promis 30 milliards d’euros de cadeau au patronat français, se devait désormais dans l’obligation de les trouver. Pourquoi, dès lors, ne pas aller en chercher une partie dans les poches des fonctionnaires, de ces millions de privilégiés qui balaient nos trottoirs, trimballent des kilos de lettres et colis à vélo, accueillent nos enfants en classe, nous soignent dans les hôpitaux, rétablissent l’électricité là où a soufflé la tempête, font vivre des théâtres, cinémas ou bibliothèques, … Il serait donc question de « geler » tout ce petit monde. Pour un gain d’environ 1 milliard d’euros par an. Fonctionnaire, mon frère, mon camarade et mon ami, attends-toi donc à demeurer à 1600 euros mensuels durant une trentaine d’années, le temps pour l’Etat d’honorer son engagement auprès du Medef, cette engeance, cette bande organisée.              
     Du reste, il ne s’agit jamais en l’espèce que d’un nouvel épisode d’une saga sans fin qui voit triompher, de part en part, deux gangs, patronat et état liés par un pacte de bon aloi et collectionnant les victoires au détriment du peuple, dindon d’une farce éculée. Un petit patron français installé aux USA vantait ainsi, à l’occasion de la visite de Hollande, la « liberté d’entreprendre » en vigueur au pays de Wild Bill Hickok. «Ici, je peux embaucher sans me demander si j’ai besoin de ces coûts, parce que je sais que je peux licencier sans problèmes dès le lendemain. » Liberté, quand tu nous tiens… On notera, dans cette sortie, une nouvelle tentative d’associer salariés et coûts, au mépris d’une loi première de l’économie du travail qui veut que le travailleur soit source de profit, tout simplement parce qu’il produit. Le travailleur ne « coûte » pas : il rapporte. Dans le cas contraire jamais il ne serait embauché, étant bien entendu que nul n’est plus éloigné du philanthrope que le patron. On aurait presque honte que de devoir rappeler ces évidences, mais on ne peut que constater que la propagande associant salariés et « coûts»  ne fonctionne que trop bien.
     La honte, toujours elle, n’étouffe pas non plus les habitants de la Confédération Helvétique, lesquels viennent de se prononcer lors d’une votation pour une limitation, via quotas, de l’immigration. Quelques Noirs et Arabes aperçus à Genève auront donc suffit à apeurer les yodeuleurs et autres porteurs de culottes en peau de vache Milka véritable. Cependant, prenons gare aux simplifications : une très courte majorité l’a emporté sur le sentiment  général, qui en Suisse demeure que l’immigration est une chance et non un problème. J’en connais qui ont honte, et marche tête baissée depuis cette votation, en mode « je n’y suis pour rien ». Qu’ils se rassurent, on évitera de mettre tous les Helvètes dans le même panier, ce qui nous contraindrait sinon à regarder de plus près les sondages montrant que près de 40% des Français déclarent partager les idées du Front National.
     La honte ne ronge pas davantage autorités locales, gouvernementales, ni même Valls, alors qu’une petite fille vient de périr dans l’incendie d’un campement Rom, à Bobigny. Pire, il ne faudra pas attendre longtemps avant que ce décès soit instrumentalisé dans le registre «  on ne peut pas laisser se propager ce genre de bidonvilles, nous les raserons pour le bien de leurs habitants». Sans qu’aucune solution de relogement bien évidemment ne se profile à l’horizon. Le trottoir ou les baraques ? Lesquels d’entre vous choisiraient le trottoir ?


                                                                                                   Frédo Ladrisse.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire