"Hommes/femmes politiques, journalistes au petit pied, philosophes du dimanche ou stars à la ramasse: tous sèment des perles de bêtise, sans se douter que, dans l'ombre, l'autruche les note, les commente, s'en gausse, et recrache le tout sur ce blog."

Septembre 2011

Qu’ils aillent se faire foutre en Espagne (ainsi parlait Geronimo)

 
Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? « Dieu est notre refuge et notre force », psalmodie ce cureton d’Obama. « Le souvenir est toujours vivace, comme l’est la douleur », surenchérit le bedeau Bush. N’en jetez plus, la messe est dite, et fut pénible comme le furent ces commémorations du 11 septembre, pauvres images vues 2001 fois tournant en boucle sur toutes les chaînes, arrosées de-ci de-là de grossières justifications au sujet des guerres qui allaient suivre, guerres qui, l’ignorez-vous ?, sont perdues mais toujours en cours. C’est vainement qu’on aurait guetté ne serait-ce qu’une séquence télévisée montrant le bombardement d’un village afghan, irakien, peuplé d’enfants et de vieillards par une escadrille yankee. En vain, également, qu’on aurait attendu ne serait-ce qu’un soupçon de regret, de la part de ce peuple si fier, hautain, fort en gueule et cependant couard, au plus haut point. Non contente de s’être construite sur des amoncellements de cadavres et rien moins que deux génocides, l’un Amérindien l’autre Noir, cette Amérique-là n’en finit plus de se vanter de défendre la, quoi déjà ? Ah oui, la « civilisation ». Qui, comme chacun sait, est l’envers de la guerre.
     Guerre un jour, guerre toujours, changeons de terrain d’opération mais sans quitter les champs de mines. Sarkozy, en rase campagne, vient de se découvrir un ennemi en la personne du chômage. Houlala, qu’il s’est dit, je l’avais oublié lui. Dès lors, contre le chômage, il « promet une bataille aussi titanesque qu’à Tripoli ». Mazette, ventre Saint-Gris, ça va chier grave, c’est promis ! Certes, les esprits chafouins rappelleront qu’à Tripoli, il n’y eut guère de bataille, en tout cas nullement titanesque. Certes, les mêmes souligneront l’incongruité de cette comparaison, étant bien entendu que si quelques missiles bien placés pouvaient comme ça créer 4 ou 5 millions d’emplois on les aurait, de long temps, tirés. Mais c’est ainsi, pour Sarkozy, il convient désormais de capitaliser sur cette guerre en Lybie, qui n’était que pur investissement. Aussi en rajoute-t-il : « on y serait pas arrivé en Lybie sans ténacité. » La bonne blague, mais qui est ce « on » dont il parle ? « Eh bien, on va mettre la même ténacité sur l’emploi. » Compte-t-il sous peu bombarder les agences de Pôle Emploi ? Sarkozy, il ose tout. C’est même à  ça qu’on le reconnait.
     Mais c’est aussi qu’il est décevant, ce pays où rien ne va à la va comme je te pousse —dans le vide. Exemple, la croissance. La sacro-sainte et trois fois reine et bénie d’entre les marchés, Croissance. Sans être tout à fait en baisse, on ne peut pas non plus dire qu’elle grimpe. Chiffre officiel pour juin : 0,00 %. Voilà qui a le mérite d’être clair, aussi le commentaire de ce cul de notaire de Baroin, ministre du budget, se veut tout pareillement limpide : « c’est un peu décevant. » Ah bon ?
     Malgré le marasme égonomique où se débattent banquiers, ministres et boursicotiers en tout genre affolés telles des truies la veille de la foire au boudin, il convient de raison garder : certes et comme dit Pierrot le bonheur, c’est toujours pour demain. Mais demain, mon copain, c’est les primaires socialistes ! Joie, pavoisons, amis, le poing et la bite en avant les voici, nos sauveurs, qui, cataclop cataclop, galopent vers l’avenir, radieux ! J’en discutais l’autre jour avec un copain militant du parti socialiste —oui oui, j’ai ça en magasin. Comme je lui demandais la raison pour laquelle il fallait payer pour voter aux primaires —ah, vous n’étiez pas au courant ? —, l’homme à la rose m’expliqua sirupeusement qu’il fallait bien « équilibrer les comptes. » Autrement dit, l’opération ne doit pas coûter l’ombre d’un kopeck au parti, pourtant gavé de millions d’euros du fait de la loi de financement des partis. Nous fûmes alors deux à lui faire remarquer qu’il s’agissait, en douce, d’un retour au suffrage censitaire, que par ailleurs ça commençait bien si, avant même d’avoir désigné leur candidat, les socialos commençaient déjà à nous faire les poches. Là, le socialiste a, si je puis dire, pris le temps de la réflexion, avant de tenter un uppercut sur le mode « de toute façon vous les anarchistes z’ êtes pas concernés, votez po, et puis vous êtes 10, ahahah. » Bisbis la carotte-heu !, serait-on tenté d’ajouter. Un court moment, l’envie me prit de lui narrer la dernière bataille opposant les apaches de Geronimo, soit 16 valeureux guerriers ne craignant pas de s’affronter aux 5 000 soldats bien nourris, surarmés de l’US Army, lancés à leurs trousses depuis des mois sans réussir à les choper. De lui rappeler qu’aujourd’hui le nom de Geronimo claque aux oreilles de tout un chacun, alors que sont, de long temps, oubliés ceux des généraux s’étant sur deux siècles épuisés à détruire les tribus. J’aurai pu également susurrer à l’oreille de ce puceau en politique qu’une guérilla zapatiste, laquelle comptait il y a vingt ans et selon le sous-commandant Marcos, 7 ou 8 hommes, oui, 7 ou 8, pas un de plus, que cette guérilla, donc, changea le cours de l’Histoire. J’aurai pu surtout souligner l’absence, systématique, du Parti Socialiste et de ses affidés lors des dernières grandes luttes sociales, son non-positionnement sur la question des sans-papiers ou de l’immigration, son message volontairement trouble, comme on dit d’une eau imbuvable, au sujet de l’école, du système de santé, du partage des richesses,… Non, j’ai fermé ma gueule. C’est que, depuis quelques années, j’économise temps et salive en évitant de m’adresser aux membres du parti socialiste français, cette engeance. Qu’ils aillent se faire foutre en Espagne. Pourquoi en Espagne, direz-vous ? Parce que Zapatero.
     Et, traversant les Pyrénées, qu’ils n’oublient pas d’embarquer dans leurs malles le père Guéant, ça nous fera des vacances. Ça en fera, surtout, aux Roms, lesquels décidemment sont bel et bien les juifs du Sarkozystan-pour-mille-ans. Stigmatisant la « délinquance d’origine roumaine » (en effet pour l’instant la loi n’autorise pas ce Goebbels d’opérette à parler de « romanichel », de « tzigane », de « mangeur d’enfants »), le voilà qui prend des mesures, ah mais oui, pas plus tard que tout de suite ! C’est que le Maréchal Chef-des-Logis Cruchot  installé place Beauvau veut « changer le visage de Paris », rien que ça. A défaut de nudistes, c’est aux Roms qu’il déclare la guerre. On pointe son Luger sur qui on peut, hein Maréchal ? Nous y voilà. On en est rendu là, à se fader les forfanteries d’un ministre de l’intérieur chargé de ramener vers le Chef les ouailles égarées au FN. « Les délinquants roumains représentent 1 déféré devant la justice pour 10, dans la capitale. » Eh beh. Ça fait du monde, se dit m’ame Michu. Il suffit cependant de demander à Guéant, pourtant chef des flics, comment il explique ce chiffre, et le voilà qui bêle : « nous n’avons pas d’explication particulière. » Bravo Charlot, tu sais dont rien ? Tu sais pas que plus on cible une population donnée, plus on la contrôle, on la traque, et plus on peut ainsi gonfler les chiffres de la délinquance relatifs à icelle ? Pfff, faut tout lui apprendre… Ce qui est valable pour les Roms le serait également pour les habitants de Vesoul, dont il serait aisé de prouver qu’ils larcinent en masse dans le métropolitain. Mais un Vésulien ça vote, hein. Autre tour de passe-passe, bien de chez nous : interdire, de manière très officielle (et la législation en cours l’autorise parfaitement), à une population donnée tout accès au travail et à toute ressource, ensuite décider de « reconduire chez eux les gens qui se maintiennent sur notre territoire sans ressources régulières. » La boucle est bouclée, quoi, qui forme un nœud même pas gordien, car tranché depuis longtemps. On notera, pour finir, la subtile expression « reconduire chez eux ». Par définition, un Rom est chez lui là où il a décidé de s’installer, et point. Dans la charte du congrès mondial des Roms, adoptée en 71 et reconnue, sur le papier, par l’Union européenne, ils se définissent, entre autre, comme « un peuple sans territoire compact. » Sans frontières, quoi. Sans « chez eux » où les renvoyer. Il n’en faut pas plus pour empêcher Guéant de dormir, comme en son temps son pote Brice Hortefeux-nouillard. On leur souhaite de longues, de perpétuelles insomnies.


                                                                                            Frédo Ladrisse.   
 
      Ah tiens, dernière minute, qu’on a bien failli oublier : explosion d’un four de retraitement de déchets nucléaires. Mais pas de fuites, non non. Ouf, nous voilà rassurés, on va, nous, dormir tranquilles.




Entre le cartable et la Kro

 
Tirant tête hors du trou, qu’entends-je ? C’est la rentrée mes bons, c’est la rentrée des cons, au premier rang voyez, droit comme un i et petit doigt sur la couture de la culotte courte, le cheveu ras l’oreille en berne mais blouse grise repassée de frais : voyez ce garçon, Luc Chatel, ministre de l’éducation. « Oui, je fais revenir la morale à l’école », plastronne le bouffon, et « dès la primaire », s’il-vous-plaît : « pas forcément tous les matins, mais le plus souvent possible, le maître [sic] va maintenant consacrer quelques minutes à un échange sur la morale. » Le maître, qu’on appelle depuis des années professeur des écoles (glissement sémantique que Chatel impute certainement à mai 68, donc au diable), abordera des thèmes variés tels « le respect des règles, le courage, la franchise. » Hum, variés, vraiment ? Il semblerait plus justement que la sarkozystérie de fin de règne ait décidée de déverser le produit du caniveau qui lui sert de pensée sur les cerveaux enfantins, aussi malléables et poreux que celui de ces grands enfants qu’on nomme les électeurs. N’empêche, que d’aucun de la garde rapprochée du sarkoland-pour-mille-ans en soit rendu à essayer de manipuler les têtes blondes, apporte une nouvelle preuve de sa déconfiture. Le sarkoland dévisse grave ? Raison de plus pour le pousser dans le tas d’épluchures et glaires où nous ne doutons pas de le voir barboter incessamment sous peu , en compagnie de ses amis du Parti Socialiste. Ainsi la tentation est grande de lui suggérer, par exemple, quelques sujets de morale absolument contemporains, susceptibles d’être abordés « quelques minutes par le maître »: le chef d’entreprise est-il supérieur au porc, et si oui, expliquez comment. Est-il réellement nécessaire de marcher sur les SDF, a-t-on l’obligation de tutoyer un sans-papier ? Ou celle-ci, pour finir : votre épouse a-t-elle raison de gentiment vous réprimander sous prétexte que vous avez violé la femme de ménage.
 
     SDF, porc, réprimande : pas de doutes, on parle de Strauss-Kahn. L’homme est libre et se tâte, pas encore décidé à revenir en France. Entre deux domiciles, l’homme pavane dans New York — New York, vous savez, cette ville baroque qu’on évacue dès lors qu’une averse menace : ah ah !, Irène, l’ouragan, le Cataclysme du siècle, la bonne blague ! Au final : une ondée, et l’Amérique une fois encore parfaitement ridiculisée. Mais de quoi parle-je ? De New York, merci. Depuis New York, DSK s’excuse. Pas auprès de sa victime, non, ce serait trop lui demander. Il s’excuse devant les employés du Fmi, ce qui est autrement plus classe. Et devant ce parterre d’aficionados  à la masse, l’homme s’est excusé de ce qu’il  nomme « a mistake. » Miss steack, miss Diallo ? C’est à peu près cela, pour lui. De France, les Valls, les Cambadélis et consorts se sont alors empressés de beugler sur toutes les antennes que voici le héros blanchi, débarrassé de ce harnais, puis qu’eux-mêmes étaient «persuadés  depuis le début de son innocence, jamais nous ne l’avons cru coupable », etc etc. Or, l’homme, s’il est libre, n’est pas innocenté. Pour cela, il lui aurait fallu avoir le courage d’affronter un procès. L’homme, ne sera jamais jugé, ne sera donc jamais blanchi. Et c’est à dessein que ses sbires feignent de mélanger absence de procès et preuve de son innocence. Alors, comme eux, et en l’absence de toute preuve à charge j’affirme haut et fort que Strauss-Kahn est coupable, que je l’ai toujours su, que j’en suis, depuis le début, persuadé. Strauss-Kahn est un violeur. Je le sais. Ça devrait suffire. Strauss-Kahn est un menteur, surtout Strauss-Kahn est un malade, comme l’affirme Michel Rocard, « un malade qui ne sait pas contrôler ses pulsions. » Mais pour une fois que Rocard nous dit la vérité, bien entendu personne ne le croit…
     Vraiment, ce serait à en désespérer de la classe politique s’il n’y avait, ici ou là, de ces Vigies Républicaines qui, lorsqu’ils ne se déclarent pas comme Sainte-Ségo-priez-pour-elle,  « tout à fait pour l’apprentissage de la Marseillaise dès l’école primaire » (pauvres gosses, décidemment, en cette rentrée les cartables se font lourds, très lourds),de ces phares de la pensée rance qui veillent nuit et jour à ce qu’aucune pollution issue de mai 68 (le diable !) ne vienne perturber le repos des bambins. A la pointe de ce combat d’arrière-cour de récréation nous retrouvons de vieux habitués, Christian Vanneste, Lionnel Luca, bref les hérauts patentés de la désormais célébrissime Droite Populaire de mes deux. La raison de leur chagrin du jour ? Une page, dans un manuel destiné aux élèves de 1ère, expliquant que l’identité sexuelle n’est pas qu’affaire de biologie, mais également de construction, s’appuyant en partie sur le contexte socio-culturel. Infamie ! Vilainie ! Blasphème ! Et les vieux homos refoulés de s’écrier d’une seule voix que « selon cette théorie, les personnes ne sont plus définies comme hommes ou femmes, mais comme pratiquants de certaines formes de sexualités. » Et donc ? Et qu’est-ce que ça peut vous ficher, pauvres barbons à poils retors, qu’un manuel scolaire redécouvre l’eau chaude ? Parce que, cela, on le sait n’est-ce pas, et de toute éternité. On le sait, mais faut pas le dire ? Non, faut pas. Aussi s’adressent-ils en ces termes à Chatel, le ministre : « nous comptons sur votre action afin de retirer des lycées les manuels qui présentent cette théorie. » Théorie mon cul, oui, il s’agirait plutôt de pratiques… Cependant ils peuvent à coups-sûrs compter sur le père-la-morale-et-dès-le-cp, s’il-vous-plaît, pour commander l’autodafé.
     Un autre de ces trouducs dont on a, heureusement peut-être, oublié jusqu’au nom (on se souvient néanmoins qu’il s’agit d’un député encarté Ump), eut cette remarquable sortie, le jour où fut versée l’allocation de rentrée : « comme son nom l’indique, cette prime est destinée à faciliter la rentrée des élèves, pas de leurs parents. Elle n’est donc pas faite pour acheter de la bière, ou des écrans plats. » Le gars, depuis des années, défend seul dans son coin un projet de loi visant à transformer en bons d’achat les quelques centaines d’euros versées chaque année aux familles. C’est son obsession, sa lubie, son Austerlitz à lui. A chaque rentrée, il remet ça : c’est dire si le gars ne fait pas confiance aux pauvres, et d’ailleurs il a bien raison : en ce qui me concerne, cours de morale ou non, entre le cartable et le pack de Kro, franchement, y’a pas photo.
 
                                                                                           Frédo Ladrisse.              

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